Parmi les multiples circonscriptions utilisées à un quelconque titre par le pouvoir royal, les généralités sont apparues tardivement ; d’abord fiscal, leur rôle n’a cessé de se renforcer pour devenir au XVIIIe siècle le cadre de l’administration royale.
C’est en effet plusieurs siècles après les diocèses ecclésiastiques, les seigneuries, ou encore deux ou trois siècles après les bailliages et sénéchaussées, qu’elles se sont progressivement imposées en apportant pour la première fois - si on excepte les paroisses elles-mêmes - une véritable unité administrative au royaume. Toutes les autres circonscriptions rivalisaient en effet en complexité, indétermination et disparité, sans que de surcroît aucune évolution rationnelle ne se dessine. Probablement, la question des finances était-elle la seule à pouvoir affranchir en général l’administration d’un imbroglio aussi profondément enraciné.
Placées sous l'autorité d'un « receveur général », les généralités étaient le cadre de la collecte des impôts directs et indirects : recettes du domaine, taille, aides et gabelle.
A la fin du XVe s., l’essentiel du domaine royal et des grands fiefs est réparti au point de vue fiscal entre quatre charges. Chaque charge est affectée à un trésorier de France pour les finances ordinaires et à un général des finances pour les finances extraordinaires. Leur résidence à la Cour imposa la nomination d’un receveur général en province.
A ce stade, les provinces récemment rattachées (Bretagne, Bourgogne, Dauphiné, Guyenne, Picardie, Provence) restent en dehors de cette structure, même si on y rencontre également un receveur général et un ordonnateur.
Au début du XVIe s., les prémisses des généralités à-venir sont, selon leur ancienneté supposée :
- la charge de Normandie à Rouen (1357)? : Normandie ;
- la charge de Languedoc à Montpellier (1377)? : Languedoc, Lyonnais, Forez, Beaujolais ;
- la charge d'Outre-Seine-et-Yonne à Paris (1436)? : Ile-de-France, Champagne ;
- la charge de Languedoïl à Tours (1452)? : Centre et Sud-Ouest, Nivernais, Orléanais, Touraine, Anjou, Maine, Berry, Poitou, Bourbonnais, Auvergne, Marche, Guyenne (séparée en 1523), Périgord, Rouergue.
A partir de ce cadre, seize recettes générales ou généralités furent créées par l’édit du 7 décembre 1542, sous Henri II. Un réel souci d’efficacité dans le recouvrement avait motivé cette structuration qui entérina également la caducité de la distinction entre finances ordinaires et extraordinaires.
Un édit de janvier 1552 établit des trésoriers généraux dans les dix-sept généralités, généralités où ils doivent résider. Leur titre officiel est « trésoriers de France et généraux des finances ». Les décennies suivantes voient la multiplication des offices jusqu’à la constitution à partir de 1577 d’un Bureau des finances dans chaque généralité ; chaque bureau étant composé de deux présidents, de huit officiers et de divers agents d’exécution. Certains de ces offices étaient exercés par alternance : chaque année deux officiers se chargeaient - alternativement - l’un de la reddition des comptes, l’autre du recouvrement.
Ensuite au XVIIe et encore davantage au XVIIIe, le statut et le rôle des trésoriers déclinèrent régulièrement, leurs prérogatives initiales étant absorbées par les intendants et leurs bureaux toujours cependant dans le cadre de la généralité. Ainsi, c'est à-peu-près privés de tout rôle effectif qu'ils attendaient des États généraux de 1789 d'être rétablis dans leur fonction primitive.
1. Élections et Greniers à sel
L’indépendance des généralités à l’égard des autres découpages administratifs ne pouvaient aller jusqu’à méconnaître la disparité fiscale des provinces et particulièrement le relatif pouvoir d’en discuter la charge des pays dits d’États. La généralité se subdivisait dans ce cas selon les circonscriptions usuelles de la province, le diocèse généralement. On parle alors de « diocèses-recettes » ou diocèses civils ; diocèses pouvant présenter des variations par rapport aux diocèses ecclésiastiques d’origine.
Aux alentours de 1380, les autres généralités du royaume où l’administration avait les coudées franches, sont subdivisées en secteurs où un élu est chargé du recouvrement des aides et de la taille.
Le système se structure suite à diverses ordonnances : 19 juin 1445, 26 août 1452, 3 avril 1460, 24 juin 1500, 11 novembre 1508, etc. Avec celle de 1452, le terme élection est adopté officiellement et les provinces et territoires concernés peuvent être appelés pays d’élection.
Entre le début et la fin du XVIe siècle, le nombre et la diversité des officiers de l'élection augmente comme leur propre nombre qui passe d'environ cent à cent cinquante. En 1578, apparaissent des gens du roi et l'élection s'en trouve confirmée comme tribunal pour les affaires relevant des aides et taille sous le contrôle d'une Cour des Aides.
Cependant les élections n'étaient pas par nature préservées de l'instabilité ordinaire et certaines furent l'objet de suppression et recréation, les élus pouvant d'ailleurs cumuler plusieurs élections. Elles présentaient de plus une grande diversité de taille : plus de 700 paroisses pour l'élection de Poitiers contre une dizaine pour l'élection de Beaufort.
Un des tout premiers impôts, la gabelle avait induit la création d’entité équivalente aux élections : les greniers à sel. Ainsi, plus anciens que les élections, on en a dénombré 158 pour l’année 1593. L’officier principal était le grenetier et ses fonctions diverses d’administrateur, comptable et juge furent confortées quand les généralités furent toujours plus investies par les intendants.
2. De la généralité à l'intendance
Dès l’origine, les généralités sont inspectées par des maîtres de requêtes, chargé du contrôle des comptes. Au début du XVIIe siècle, ces derniers prennent le titre d’intendant de police, justice et finance et commissaire départi du roi. À la fin du XVIIe siècle, sous le règne de Louis XIV, les intendants résident de façon permanente dans leur généralité. Toutefois, il arrive que les généralités et les intendances ne coïncident pas : ainsi il y a deux généralités en Languedoc : Toulouse et Montpellier, mais une seule intendance à Montpellier.
Ils deviennent des administrateurs bien plus que des inspecteurs et leur pouvoir est très supérieur à celui du receveur général. Au Modèle:XVIIIe siècle les intendances sont subdivisées en subdélégations, confiées à un subdélégué choisi par l’intendant et révoquable par lui. Outre ses missions officielles, l’intendant s’occupe souvent du développement économique et social de sa généralité : introduction de nouvelles cultures, amélioration du réseau routier, organisation de la charité, stockage du blé les années de bonnes récoltes afin de pouvoir le revendre les mauvaises années et éviter ainsi les disettes. Du fait de l’importance de son rôle, on appelle souvent généralités-intendances les généralités.
Les intendants ont été un des rouages majeurs de la centralisation progressive de la France. On considère parfois qu'ils préfigurent les préfets actuels.
3. Liste des généralités-intendances
Généralité | Année de création | Provinces |
---|---|---|
Généralité de Bordeaux, (Agen) | (1542) | Guyenne |
Généralité de Provence, ou d'Aix-en-Provence | (1542) | Provence |
Généralité d'Amiens | (1542) | Picardie |
Généralité de Bourges | (1542) | Berry |
Généralité de Caen | (1542) | Normandie |
Généralité de Châlons | (1542) | Champagne |
Généralité de Bourgogne, Dijon | (1542) | Bourgogne |
Généralité de Grenoble | (1542) | Dauphiné |
Issoire puis Généralité de Riom | (1542) | Auvergne |
Généralité de Lyon | (1542) | Lyonnais, Beaujolais et Forez |
Généralité de Montpellier | (1542) | Languedoc |
Généralité de Paris | (1542) | Île-de-France |
Généralité de Poitiers | (1542) | Poitou |
Généralité de Rouen | (1542) | Normandie |
Généralité de Toulouse | (1542) | Languedoc |
Généralité de Tours | (1542) | Touraine, Maine et Anjou |
Généralité de Metz | (1552) | Trois-Évêchés |
Nantes | (1552) | Bretagne |
Généralité de Limoges | (1558) | Limousin, Marche et Angoumois |
Généralité d'Orléans | (1558) | Orléanais |
Généralité de Moulins | (1587) | Bourbonnais |
Généralité de Soissons | (1595) | Picardie |
Généralité de Montauban | (1635) | Gascogne |
Généralité d'Alençon | (1636) | Perche |
Généralité de Perpignan | (1660) | Roussillon |
Généralité de Besançon | (1676) | Franche-Comté |
Généralité de Valenciennes | (1678) | Hainaut |
Généralité de Strasbourg | (1689) | Alsace |
Généralité de Lille | (1691) | Flandres |
Généralité de La Rochelle, La Rochelle | (1694) | Aunis et Saintonge |
Généralité de Nancy | (1737) | Lorraine |
Trévoux | (1762) | Dombes |
Généralité de Corse, ou de Bastia | (1768) | Corse |
Généralité d'Auch | (1776) | Gascogne |
Bayonne | (1784) | Labourd |
Pau | (1784) | Béarn et Soule |
Important !
Ce document contient des informations provenant à l'origine de l'encyclopédie collaborative Wikipédia. Même s'il a fait l'objet d'une validation rapide et s'il a pu être corrigé depuis, toutes les informations qu'il contient n'ont pu être vérifiées, aussi nous vous recommandons la consultation d'autres sources avant de l'utiliser.
Vous pouvez en consulter la dernière version à l’adresse https://libresavoir.org/index.php?title=Généralités (circonscription d’Ancien Régime).
Vous avez la permission de copier, distribuer et/ou modifier ce document selon les termes de la « Licence de documentation libre GNU », dans sa version 1.2 ou plus récente publiée par la Free Software Foundation ; sans sections inaltérables, sans texte de première page de couverture et sans texte de dernière page de couverture.
Copyright (c) les auteurs sur Libre Savoir.