The Hidden de Jack Sholder

Intérêt
Excellent film de série B, The Hidden (primé au Festival de Cognac en 1987) utilise le fantastique , et la science-fiction , pour proposer l’éternelle lutte du Bien contre le Mal (et un regard acide sur la politique résumée à la jouissance absolue du pouvoir) à travers une alternance savante d’actions débridées et de courts moments de répit.


Table des matières

1. Analyse


Récompensé à juste titre par le Grand Prix du festival d’Avoriaz en 1988, The Hidden présente un triple intérêt : une histoire originale et très cohérente qui peut se lire à un double niveau ; une réalisation efficace qui va droit au but sans fioritures ni temps morts ; un humour souvent décapant et toujours bien venu associé, paradoxalement, à une émotion communicative.

Du point de vue du récit, Jack Sholder ne donne la clé des événements incompréhensibles qui bouleversent la vie de Los Angeles que peu à peu, entretenant ainsi un suspens efficace, et l’histoire se suit avec plaisir, d’autant plus que le scénario est d’une grande habileté.

Le film s'ouvre sur l'attaque d'une banque et une fusillade d'une rare violence d'autant plus qu'elle est absolument gratuite, Puis enchaîne sur une longue poursuite de voitures particulièrement percutante. Le rythme ainsi lancé ne se ralentira jamais et les scènes d'action sont suivies d'autres scènes d'action tout aussi spectaculaires et débridées. Le mérite du film est toutefois de savoir interposer habilement de brèves scènes de pause pour donner des explications qui servent à relancer le mystère dans la mesure où elles ne dévoilent que progressivement la réalité en oeuvre sous les yeux du spectateur.

Il va de soi que le premier coup de théâtre réside dans le passage d'un corps à l'autre de la créature « immonde » (de Jack De Vries à Jonathan Miller). Cette « métamorphose » initiale en engendre alors une autre pour le spectateur en faisant passer le film du genre policier au genre fantastique et/ou de science fiction. Par ailleurs, ces « réincarnations » rythment le film en en relançant sans cesse l'intérêt : au nombre de six (De Vries → Miller → Brenda → le chien de Masterson → Masterson → Willis → Beck), elles ne sont pourtant pas égales car on note une accélération pour les quatre dernières avec des séquences de temps de plus en plus brèves, ce qui annonce la fin de l'histoire.

Cette première métamorphose et les suivantes suscitent aussitôt une curiosité qui ne sera satisfaite que partiellement. Ainsi les questions de Tom Beck à Gallagher reçoivent des réponses évasives qui ajoutent au mystère sans le résoudre. Ainsi en est-il de la surprise de Beck quand il voit la Porsche de Gallagher : « Je l’ai volée » répond ce dernier - ce qui est la vérité mais une vérité que l’on ne peut alors comprendre. Il en est de même pour la question de Barbara Beck sur la ville où il est né : il se contente de lever le doigt vers le ciel, ce qui est aussi la vérité, mais Barbara interprète cela comme la direction du Nord. Un autre exemple concerne la réaction de la fillette de Beck lorsqu’elle voit Gallagher : son regard et son visage tels qu’il sont filmés révèlent un trouble né de sa perception de l’invité Gallagher ;  mais l’explication ne suit pas. Pour résumer, le réalisateur parsème son film de signes à interpréter peu à peu mais qui ne trouveront pourtant d’explication définitive qu’à la toute fin.

Au-delà du simple film d'action spectaculaire, le réalisateur se propose d'illustrer l'éternelle lutte du Bien contre le Mal en recourant aux codes du fantastique et de la science-fiction. Le manichéisme est total et sans nuances. On notera, en effet, que le Mal est représenté par une créature sombre et visqueuse proprement répugnante, alors qu'à l'inverse, le Bien - qui ne se révèle qu'à la fin – est symbolisé par un rayon lumineux d'une grande douceur. D'autre part, cette créature extraterrestre du Mal aime prendre possession d'autrui pour son seul profit (masquer ce qu'elle est en s'incarnant dans un autre corps) et contamine les corps dont elle s'empare (De Vries et Miller étaient des citoyens honnêtes), tandis que le Bien se met au service d'une famille éplorée en s'incarnant dans Tom Beck. Il faut aussi évoquer la « philosophie » de la créature du Mal. Obnubilée par la réalisation de ses désirs sans délai, ellel aime les Ferrari, les femmes, la musique Rock et, surtout, désire par dessus tout dominer. Très vite, elle a compris que ses pouvoirs peuvent lui permettre de dominer la terre comme elle le dit à Gallagher/Alhag, qu’il lui faut prendre possession de celui qui sera le futur président doté des plus grands pouvoirs et il cherche à réaliser son projet cohérent - une regard acide sur la politique résumée à la jouissance absolue du pouvoir ? Gallagher/Alhag ne vise quant à lui qu’à protéger autrui de cet instrument du Mal et son dessein est de vivre heureux en famille. L’un affiche sa volonté de puissance et sa soif de pouvoir (« Je veux », répète-t-il, comme un leitmotiv) quand l’autre veut préserver autrui du malheur. Notre actualité politique quotidienne illustre bien cette lutte permanente.

L’un des atouts du film est, enfin, de proposer une forme d’humour souvent corrosif, assorti au cynisme de la créature du mal. Dès les premières minutes, De Vries talonné par les voitures de police roule à tombeau ouvert (dans un parc !!!) où il percute contre un handicapé dans son fauteuil qu’il envoie valdinguer. On rappellera aussi quelques répliques qui font mouche. Par exemple, à un acheteur d’une Ferrari, le vendeur offre de la drogue pour célébrer la vente et lui rappelle qu’il peut rouler à 200 km à l’heure. L’acheteur demande : « Sur autoroute, bien sûr ? ». « Non, répond le vendeur, ça c’est facile ; en ville, voyons ! ». Dans le même ordre d’idées, mais plus facétieux, on signalera l’humour des paroles de la chanson I feel like a woman/Je me sens comme une femme que l’on entend immédiatement après que la créature est passée de Miller dans le corps de la sculpturale effeuilleuse Brenda – et à son plus grand profit, semble-t-il !

Pour finir, on mettra l’accent sur la volonté du réalisateur de proposer une construction cohérente du déroulement de son film. Le rythme heurté et emporté de l’action, la plupart du temps, laisse place, à deux reprises, à son contraire pour mieux faire ressortir son propos. C’est ainsi que Sholder utilise le contraste des couleurs (couleurs dominantes crues et vives par opposition aux lumières tamisées et douces) et de la musique (hard rock violent et dissonant par contraste avec les sons harmonieux et mélodieux) pour marquer l’antithèse entre la sauvagerie des instincts et la douceur de la vie en famille ; une antithèse heureusement symbolisée par deux séquences judicieusement placées : l’une, centrale dans le film, lorsque Beck et sa femme accueillent Gallagher chez lui dans une ambiance très intimiste et chaleureuse sécrétant une réelle bienveillance ; l’autre, qui clôt le film, lors de la réincarnation de Gallagher en Tom Beck, dans une atmosphère de recueillement paisible et harmonieux. Il faut observer que la première séquence annonce la seconde et l’imprègne, comme en écho, d’une résonance et d’une tonalité toutes particulières.


2. Synopsis


A Los Angeles, un nommé Jack de Vries attaque une banque de façon sanglante : sans raison impérieuse, il abat les vigiles et plusieurs policiers alertés, avant de s'enfuir, son forfait commis, au volant d'une Ferrari à bord de laquelle il fonce à travers la ville poursuivi par une impressionnante file de véhicules policiers : brûlant les feux-rouges et n'hésitant pas à percuter ceux qui se mettent sur son trajet, jusqu'à ce qu'il se trouve face à un barrage policier fait d'une dizaine de véhicules et de nombre de policiers surarmés qui l'attendent. De Vries n'arrête pas pour autant sa Ferrari qui percute le barrage, reçoit un feu nourri et finit sa course contre un mur avant de prendre feu. De Vries, criblé de balles et en sang, sort du véhicule avant que ce dernier n'explose.

Tom Beck, le détective chargé de l'affaire, se rend à l'hôpital où a été transporté de Vries en compagnie de son second, Cliff Willis. Le docteur les informe que le blessé ne passera pas la nuit. Au commissariat, Beck voit arriver un nommé Lloyd Gallagher qui se présente comme un agent du FBI de Seattle à la poursuite de Vries depuis un mois. Apprenant que ce dernier est grièvement blessé, il est semble préoccupé et se rend en toute urgence à l'hôpital où de Vries se lève brusquement, se défait de son appareillage, ouvre la bouche de son voisin de chambre victime d'une crise cardiaque et une bête noire et visqueuse s'extrait de sa propre bouche pour entrer dans celle de Jonathan Miller ; puis Miller sort tranquillement sous les yeux du docteur et de son assistante stupéfaits. Gallagher, arrivé trop tard pour se saisir de De Vries, affirme à Tom Beck, sceptique, que Jonathan Miller est recherché, lui aussi, par le FBI.

Ce dernier se trouve dans un magasin de musique et écoute du rock, le son monté à fond tout en mettant des cassettes dans ses poches. Le vendeur l'interpelle et est aussitôt froidement abattu. Gallagher. Une femme découvre la scène du crime. Pendant ce temps, Tom Beck refuse de lancer un avis de recherche à l'encontre de Jonathan Miller qui, selon ses dossiers, est un citoyen honnête. Mais l'assassinat du vendeur et le témoignage de la femme témoin qui identifie Jonathan Miller lui fait reconsidérer son point de vue, d'autant plus que Gallagher affirme que de Vries et Miller sont complices. Les deux hommes partent à la recherche du nouveau suspect dans la Porsche de Gallagher qui explique à son voisin curieux qu'il l'a volé.

Cette fois-ci, Miller se trouve dans un restaurant où il incommode les clients en diffusant de la musique rock à plein volume. Il découvre à la Tv – et semble très intéressé – que le sénateur Holt sera sans doute candidat à la prochaine élection présidentielle. Un Ferrari rouge qui passe dans la rue le distrait ; il sort sans payer et poursuit en courant le bolide. Pendant ce temps, Gallagher explique à Tom Beck que De Vries était allé voir Miller à l'hôpital et que Miller est prêt à abattre quiconque s'oppose à ses désirs. Beck lui remarquer que ce portrait ressemble à celui de De Vries. Gallagher acquiesce : « ce sont les mêmes », précise-t-il.

On retrouve Miller qui a rejoint une concession Ferrari où un acheteur finit son essai avant achat. Miller veut prendre la voiture et comme on s'oppose à son désir, il abat le vigile, le concessionnaire et l'acheteur, qui n'est autre qu'un trafiquant d'armes. Ce qui habite le corps de Miller éprouve les malaises de son hôte. Il se rend toutefois chez le trafiquant dont il a volé la mallette et s'arme puissamment. De son côté, Gallagher confie à Beck que Miller aime les Ferrari – tout comme De Vries – et que les deux comparses ont tué son coéquipier à Seattle. Tom Beck invite Gallagher chez lui et lui présente sa femme, Barbara, et sa fillette qui semble intriguée, voire effrayée, par le regard de Gallagher. Un Gallagher qui semble charmé par l'atmosphère de paix et de sérénité du foyer éclairé par de douces lumières tamisées et confesse que Miller a tué, outre son coéquipier, sa femme et sa fille.

De son côté, Miller, attiré par les jeunes et belles femmes se retrouve dans un club de strip-tease et poursuit de ses assiduités Brenda, une effeuilleuse qui lui a plu mais qui le trouve repoussant. L'être qui habite Miller se fâche contre elle et en profite pour changer de corps : cette fois il s'incarne en Brenda ! Et il utilise aussitôt sa nouvelle enveloppe en faisant l'amour avec un client - qui en meurt - dans un taxi : l'expérience semble le ravir ! Il vole la voiture du client et s'enfuit.

Alerté en pleine nuit, Beck tire Gallagher du lit les deux hommes se rendent au club de strip-tease. Gallagher comprend ce qui s'est passé et informe Beck, toujours aussi sceptique, que Brenda est à rechercher. Il la localise dans un magasins de mannequins. Après un échange de tirs, elle s'enfuit sur le toit où Beck est blessé tandis que Gallagher la crible de balles : Brenda à l'agonie provoque verbalement, d'une voix étrange, Gallagher qui sort une arme étrange pour détruire la bête. Mais Brenda saute dans le vide. Gallagher a beau se précipiter dans les escaliers, lorsqu'il arrive la bête a pris possession du corps du chien de Masterson tout juste arrivé sur les lieux du drame. Gallagher est désemparé mais confie à Beck que désormais l'assassin l'a vu et sait où le retrouver, Beck, ulcéré du refus d'explications de l'agent du FBI, le fait mettre en prison au commissariat ! Puis il se renseigne et apprend que Gallagher est présumé avoir disparu depuis un incendie de forêt au cours duquel, en compagnie de son coéquipier, Robert Stone, il participait à une chasse. D'après la photographie, Gallagher aurait en fait usurpé l'identité de Stone et aurait bien volé une Porsche ! Interrogé, Gallagher/Stone confirme qu'ils poursuivaient un extra-terrestre capable de s'introduire dans les corps humains et de vivre ainsi. Beck n'ajoute aucune foi à ces explications.

Pourtant, dans la maison de Masterson, son propre chien l'attaque et s'introduit en lui. Après quoi, le faux Masterson se rend au commissariat pour, comme l'affirmait Gallagher, se débarrasser de lui. Poursuivi par Masterson, Beck se retrouve dans la cellule de Gallagher qui lui révèle enfin la vérité : il vient de la planète en orbite autour d'Altaïr, se nomme Alhague, est policier et traque celui qui a tué sa femme et sa fille. Il ajoute que son arme ne peut tuer la bête qu'au moment où elle change d'enveloppe charnelle. Bientôt Masterson arrive devant la cellule, interpelle Gallagher/Alhague en lui proposant de conquérir la Terre puisque rien, chez les humains, ne peut s'opposer à eux. Puis Masterson tire une roquette. Dans l'explosion et la confusion qui s'ensuivent, Masterson s'introduit dans le corps de Willis et s'enfuit du commissariat à feu et à sang.

Poursuivant son but de devenir l'homme le plus puissant de la terre, la créature/ Willis se rend à la conférence de presse au cours de laquelle le sénateur Holt doit annoncer sa candidature à l'élection présidentielle dans l'intention de s'approprier un nouveau corps. Mais l'alerte est donnée : on essaie vainement d'arrêter Willis. Au cours de la fusillade, Willis et Beck sont blessés. La sécurité dissimule le sénateur dans un placard où s'introduit Willis pour la substitution, sans que l'attaché de presse ne s'en aperçoive tant la confusion règne. Le faux sénateur se hisse jusqu'au podium où il annonce sa candidature.

Mais surgit Gallagher/Alhag, un lance-flammes à la main qui est touché par les balles des policiers de la sécurité mais a le temps de viser le faux sénateur qui s'embrase ; la créature sort alors dans les hurlements de l'assistance ; ce qu'attendait Alhag pour le viser avec son arme et le faire exploser avant de s'évanouir.

A l'hôpital, on retrouve Alhag et Beck mortellement blessé, côte à côte. La femme de Beck et sa fille sont désespérées. Alhag, très émue par le spectacle, attend qu'elles sortent, se lève, ouvre la bouche de Beck et un faisceau lumineux sort de sa propre bouche pour entrer dans celle de Beck, après quoi il tombe au sol. Quand Barbara et la fillette reviennent dans la salle, c'est pour découvrir Beck inanimé au sol et se rendre compte que leur mari et père s'éveille guéri. La fillette marque une hésitation comme elle l'avait fait précédemment en voyant Gallagher, puis elle lui sourit et il lui prend la main. Beck survit ainsi aux yeux de sa famille, une famille qu'a reconstituée Alhag qui, de son côté, retrouve une femme et une fille qu'on lui avait enlevées.


3. Fiche technique


  • Titre original : The Hidden
  • Réalisation : Jack Sholder
  • Durée : 96 minutes
  • Année : 1987
  • Scénario : Jim Kouf
  • Production : Stephen Diener, Dennis Harris, Jeffrey Klein, Michael L. Meltzer, Lee Muhl, Gerald T. Olson et Robert Shaye
  • Sociétés de production : Heron Communications et New Line Cinema
  • Musique : Michael Convertino
  • Photographie : Jacques Haitkin
  • Montage : Michael N. Knue et Maureen O’Connell
  • Décors : C.J. Strawn et Mick Strawn
  • Costumes : Malissa Daniel

Distribution :

  • Lloyd Gallagher : Kyle Mc Lachlan
  • Tom Beck : Michael Nouri
  • Brenda Lee : Claudia Christian
  • John Masterson : Clarence Felder
  • Cliff Willis : Ed O’Ross
  • Jonathan Miller : William Boyett
  • Jack deVries : Chris Mulkey
  • Le lieutenant John Masterson : Clarence Felder
  • Sanchez : Richard Brooks
  • Barbara Beck : Katherine Cannon
  • Le sénateur Holt : John McCann



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Droits d'auteur © Henri PHILIBERT-CAILLAT



4. Bande annonce




 
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Contenu sous droits d'auteur — Dernière mise-à-jour : 2015-09-15 10:06:11




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